Littérature

Faux dieux, vrais bastons : la saga pulp de Steve Higgs

Signée Steve Higgs, Le Royaume des faux dieux est une saga d’urban fantasy trépidante et réjouissante, portée par des personnages accrocheurs et un univers foisonnant, malgré une satire religio-politique qui s’émousse dans un final plus spectaculaire que subversif.

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Gabriel

17 juin 2025

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Le Royaume des faux dieux est une saga d’urban fantasy résolument divertissante, portée par un sens du rythme efficace, des pointes d’humour et des scènes d’action généreuses. On y passe un vrai bon moment, même si l’univers, très foisonnant, flirte parfois avec la surenchère mythologique au détriment de la charge satirique. La série compte 11 tomes en français, signés Steve Higgs. 

Introduction à un urban fantasy débridé

Dès le premier tome, on suit Otto Schneider, détective et sorcier allemand, dans un monde où anges, démons et « faux dieux » s’invitent dans notre réalité. Sa to-do list tient autant du polar que de l’épopée infernale : s’évader d’une cellule, recruter un loup-garou, puis envahir un royaume démoniaque pour sauver une enfant. Le ton est clair : nerveux, drôle, pulp. 

Une critique sociale à travers la fantaisie urbaine

Sous le vernis fun, la série s’amuse à dynamiter la religion-spectacle et les petits arrangements du pouvoir : bureaucraties célestes, cabales occultes (l’« Alliance »), miracles opportunistes et promesses de salut brandies comme outils de contrôle. L’urban fantasy sert ici de loupe sur la manipulation des croyances et la privatisation du sacré, sans se départir d’une ironie légère. 

Des personnages marquants, entre punchlines et blessures

Otto, vieux briscard irascible au cœur cabossé, accroche par son mélange de débrouille et de mauvais esprit. Zachary, loup-garou immortel, apporte une physicalité brute et un sens de l’honneur malmené. Anastasia Aaronson, révélation des tomes centraux, canalise une puissance que convoitent anges et démons, faisant glisser la saga vers une échelle quasi biblique (armure, épée et bouclier « de Dieu »). Ces arcs croisés donnent de vrais pics d’énergie. 

Un dernier acte qui privilégie l’escalade au message

Dans les ultimes volumes, l’affrontement total entre anges, démons et humains prend le dessus. Spectacle garanti, mais la satire des institutions religieuses et de leurs faux prophètes se dilue parfois dans le tumulte cosmique. Les enjeux restent clairs, l’adrénaline aussi, mais le propos perd un peu de netteté. 

Conclusion

Le Royaume des faux dieux réussit son pari de série page-turner : humour, bastons magiques, bestiaire généreux et héros attachants. Si la montée en puissance mythologique brouille un peu la charge critique en fin de parcours, l’ensemble demeure une lecture franchement réjouissante pour qui aime l’urban fantasy à haute énergie — avec, en bonus, quelques fléchettes bien senties contre nos « dieux » contemporains. 

On notera toutefois que la version française comporte quelques soucis de traduction... rien d'insurmontable, mais ça peut vous sortir la tête du livre assez brusquement : dommage.